Leïla Merouane : la langue d'une femme libre
Leïla Merouane : la langue d'une femme libre, sans compromis, traquant les interdits et les injustices, les soumissions et les muselières. A la fois écrivaine et journaliste Algérienne.
« J’ai cassé le mythe du retour ». « J’ai toujours un ange qui se promène dans mes livres. » « C’est la soumission qui m’a sauvé la peau ! »
http://www.tsr.ch/video/emissions/archives/singulier/50644-leila-marouane.html
Leyla Zineb Mechentel est née en juillet 1960. Plus tard, dans un nouvel exil, à Paris, elle signera ses romans du pseudonyme de Leïla Merouane.
Ses romans ne sont pas publiés en Algérie. Dernier roman paru "La vie sexuelle d'un islamiste à Paris" (Julliard, 2007) traduit dans plusieurs langues.
Elle écrit dès l’âge de 6 ans, dans ses cahiers d’écolier des poèmes et des contes, inspirés par les contes et légendes racontées par sa grand-mère. Progressivement, alors qu’elle prend conscience de la vie difficile des femmes et des mères qui l’entourent, de la tristesse de sa propre mère reléguée du jour au lendemain aux seules tâches de mère et d’épouse, ses écrits deviendront iconoclastes. Le refus de vivre par intérim sera un de ses premiers combats.
Dès 10 ans, elle est repérée par ses enseignantes. A 12 ans, son professeur de français, une Corse, lui propose de publier un premier recueil. Craignant la déception de ses parents, qui la voulaient médecin, elle refuse. C’est à la mort de sa mère, en 1991, alors qu’elle entamait son exil en France, qu’elle prend la décision de publier ses écrits.
A 25 ans, en 1984, après des études de médecine écourtées, et une inscription à la Faculté des lettres d’Alger, elle devient journaliste à El-Amel, un mensuel lancé par le ministère de la Jeunesse et des Sports, qui sera une année plus tard saisi la police, puis interdit par l’Etat. Neuf mois plus tard, alors qu’elle s’était promis de ne plus s’approcher d’une rédaction, elle accepte la proposition de redevenir journaliste.
Quoique souvent censurée, elle s’attaque à des sujets tabous (situation des mères célibataires et des enfants abandonnés).
Dès l’avènement du multipartisme, avec la Constitution de février 1989, et la légalisation des islamistes, elle se fait remarquer par une série de chroniques corrosives dénonçant la corruption érigée en système de gouvernance, s’insurgeant contre les tabous et les interdits de la société algérienne d’alors. Impliquée dans le combat des femmes dès 1981, proche des militantes féministes de l’époque, comme Louiza Hanoune et Khalida Messaoudi, l’actuelle Khalida Toumi, ministre de la Culture, elle s’attaque au Code de la famille et aux islamistes.
En dépit des menaces, elle continue de donner la parole au démunis et laissés-pour-compte, de couvrir les manifestations de ses camarades féministes, elle s’intéresse aux femmes islamistes, qui se qualifient elles aussi de "féministes", elle couvre la fameuse marche de celles-ci, en 1989. Elle condamne leur appel d’appliquer la charia. Quelques jours après la publication de son article et une série de lettres aussi menaçantes les unes que les autres, elle est victime d’une expédition punitive à Bou Ismaïl. Des hommes l’attaquent à l’arme blanche. Une coupure profonde au bras, une autre moins profonde, au crâne. Ils étaient trois. Ils la laissent pour morte, en sang, sur un trottoir de Bou Ismaïl, ville du littoral ouest d’Alger. En 1990 Leïla Merouane quitte Horizons et l’Algérie. Elle s’installe à Paris.
En1993 elle commence l’écriture de ce qui deviendra La fille de la Casbah (Ed. Julliard, 1996), un texte où elle n’épargne rien ni personne, y dépeint la montée de l’intégrisme avec la complicité du pouvoir algérien. Elle publie cinq romans, plusieurs nouvelles et un récit, Le papier, l’encre et la braise, une commande des éditions du Rocher, qu’elle signera, en 2009, avec son vrai nom.
Dans La vie sexuelle d’un islamiste à Paris, elle se met dans la peau d’un homme, un Maghrébin jusque-là engoncé dans la religion, qui confesse ses complexes et ses fantasmes à l’égard des femmes occidentales. « Leïla Merouane se livre à une autopsie implacable de l’univers asphyxié de l’homme arabe et maghrébin ligoté par la religion, enfermé dans une sorte de schizophrénie dont il ne peut se libérer, sinon par une sorte de guerre ethnique livrée contre soi-même et qui le mènera à la déraison » (Rachid Mokhtari)
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