Au Japon, l'économie montre des signes d'essoufflement
Le Monde | 17.02.2014 à 07h44 • Mis à jour le 17.02.2014 à 11h26 | Par Philippe Mesmer (Tokyo, correspondance)
L'économie japonaise affiche certes sur l'ensemble de l'année une croissance de 1,6 %, soit le meilleur chiffre enregistré depuis 2010. Mais la relative contre-performance de la période octobre-décembre inquiète.
Les chiffres trismestriels sont inférieurs aux attentes des économistes, qui tablaient sur une augmentation de 0,7 % (et 2,8 % sur un an).
Même si l'archipel a connu le quatrième trimestre consécutif de croissance, l'économie japonaise a souffert d'exportations en hausse limitée (+ 0,4 %), alors que les importations ont crû de 3,5 %. Le déficit commercial a augmenté de 65,3 % en 2013 pour s'établir à 11474,5 milliards de yens (82,3 milliards d'euros), un record depuis 1979.
L'augmentation des importations de matières premières, pour compenser l'arrêt des réacteurs nucléaires, n'est qu'une des causes de ce déficit. Celui-ci tient principalement aux délocalisations de la production et au manque de compétitivité des entreprises nippones, qui apparaît d'autant plus inquiétante que le yen a baissé de 20% en 2013 face au dollar.
Les difficultés des économies émergentes, depuis l'annonce fin 2013 du resserrement de la politique monétaire américaine, et les mouvements erratiques des marchés financiers, suscitent aussi des inquiétudes pour les exportations nippones.
Entre octobre et décembre2013, la croissance n'a dépendu quasiment que de la demande intérieure. La consommation des ménages, qui génère 60% du PIB, a crû de 0,5%. Elle était toutefois attendue en hausse de 0,7%.
Le 1er avril, la taxe sur la consommation doit passer de 5% à 8% et son impact sur la consommation est redouté. En 1997, la précédente hausse de TVA avait plongé le Japon dans la récession. Au premier trimestre 2014, le PIB devrait bénéficier d'une demande soutenue à l'approche de cette hausse.
L'EFFET DES « ABENOMICS » S'ATTÉNUE
Pour la suite, et malgré l'annonce, en octobre 2013, d'un plan de relance pour compenser l'augmentation de la TVA, la capacité de rebond de l'activité au Japon est considérée comme le vrai test des «Abenomics », les mesures monétaires et de soutien mises en place par la Banque du Japon et le gouvernement de Shinzo Abe depuis son retour au pouvoir en décembre 2012. Elles ont déjà permis un retour de l'inflation, à 1,3 % en 2013.
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Mais leur impact semble s'atténuer, d'autant plus que le gouvernement tarde à décocher la troisième «flèche» de ces Abenomics. Celle-ci doit se traduire par des réformes structurelles pour soutenir la croissance en améliorant la compétitivité des entreprises et de certains secteurs, agricole notamment.
Dans le même temps, les salaires sont attendus en hausse. Mais les augmentations devraient rester limitées. Elles risquent de ne pas compenser la hausse des prix et de ne pas donner suffisamment confiance aux consommateurs.
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