Syrie : la classe politique divisée face à une éventuelle intervention
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Si le président du Modem, François Bayrou, a lancé mardi "un appel pressant à la prudence", le président de l'UMP, Jean-François Copé, a déclaré mercredi matin sur Europe 1avoir trouvé François Hollande "juste sur la forme comme sur le fond". Il a jugé "indispensable" que le chef de l'Etat rencontre les responsables des partis à propos de la crise syrienne.
JUPPÉ : "AIDER MILITAIREMENT LA RÉSISTANCE SYRIENNE"
Dans un texte publié sur son blog le 23 août, l'ancien ministre (UMP) des affaires étrangères Alain Juppé avait appelé à "s'affranchir des blocages" qui persistent au sein du Conseil de sécurité de l'ONU pour "aider militairement la résistance syrienne". "La seule alternative, c'est la poursuite du martyre du peuple syrien. Il ne faudra plus, alors, continuer à verser des larmes de crocodile. Il nous restera le silence de la complicité", avait conclu M. Juppé sur son blog.
L'ancien premier ministre François Fillon (UMP) continue de miser, pour sa part, sur une solution diplomatique ayant l'aval de Moscou. "La seule issue à la crise syrienne est une réunion à Genève sous l'égide des Nations unies (...) La seule façon d'obtenir réellement la fin des combats, c'est d'obtenir des Russes qu'ils forcent Bachar Al-Assad à venir à la table des négociations", affirme M. Fillon dans un entretien à l'hebdomadaire Paris-Match, qui a été mis en ligne mardi. "Poutine est quelqu'un avec qui on peut discuter à condition de respecter son point de vue et d'accepter au moins de l'entendre", estime M. Fillon, précisant qu'il se rendra en Russie"dans quelques semaines" pour rencontrer le président russe.
A droite, le député souverainiste Nicolas Dupont-Aignan, qui réclame l'inscription à l'ordre du jour d'un débat parlementaire sur la situation en Syrie, a invité mardi M. Hollande à ne pas participer à une intervention militaire qui serait, selon lui, "une aventure hasardeuse". "Ce qui se prépare en Syrie aura des conséquences immenses sur le cours du monde", a ajouté le député de l'Essonne, notant que "partout où les Occidentaux ont tenté d'imposer par la force leur démocratie, cela s'est terminé en fiasco".
LE GOUVERNEMENT FRANÇAIS EST "SUIVISTE"
Président (UMP) de la commission des finances du Sénat et vice-président du groupe d'amitié France-Syrie, Philippe Marini a mis en garde contre le risque d'une "déstabilisation" du Proche-Orient. Rappelant "l'indépendance" que Jacques Chirac avait manifestée vis-à-vis des Etats-Unis au sujet de la guerre en Irak, M. Marini a déploré que l'actuel gouvernement français soit "suiviste, sans véritable esprit critique".
La gauche de la gauche tient peu ou prou le même langage. Jean-Luc Mélenchon, coprésident du Parti de gauche, a affirmé, mardi sur BFMTV et RMC, qu'une intervention militaire "serait une erreur gigantesque, peut-être le seuil d'une guerre beaucoup plus large que toutes celles que nous avons vues dans cette région".
Estimant que "les Nord-Américains ont l'habitude d'utiliser n'importe quelle sorte d'argument pour justifier une intervention militaire", M. Mélenchon a recommandé de prendre"le temps du sang-froid" et de travailler à "une solution politique".
"UNE ESCALADE SANS ISSUE"
Dans une lettre ouverte adressée, mardi, au président de la République, le secrétaire national du PCF, Pierre Laurent, assure qu'une intervention militaire de Washington et de ses alliés "constituerait aujourd'hui un degré supplémentaire dans une escalade sans issue". "Bombarder la Syrie serait ajouter la guerre à la guerre, entraînant le risque jusqu'ici inégalé d'un embrasement de toute la région", ajoute M. Laurent, qui souhaite une "réunion d'urgence d'un sommet des belligérants et des principales puissances impliquées".
Le PCF réclame lui aussi l'inscription à l'ordre du jour du Parlement d'un débat sur la situation en Syrie. Dans un communiqué publié dimanche, et cosigné par Mounzer Makhous, membre de la Coalition syrienne en France, les dirigeants d'Europe Ecologie les Verts (EELV) avaient demandé au gouvernement français et à l'Union européenne de "protéger les populations civiles", sans faire allusion à une éventuelle intervention militaire.
Dans un communiqué publié mardi soir et titré "Syrie : Hollande choisit les islamistes", la présidente du Front national, Marine Le Pen, écrit que l'engagement de la France est "une décision précipitée, fondée sur des supputations (...), qui inféode une nouvelle fois gravement la France aux Etats-Unis". "La charia, la persécution des Français de Syrie, voici ce qui attend ce pays si les Etats-Unis et la France interviennent", affirme Mme Le Pen.