Delphine Batho, un limogeage pour l'exemple
Foi de Jean-Pierre Chevènement, "un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne".
Pour ne l'avoir pas "fermée", Delphine Batho, la jeune ministre de l'environnement, vient de subir la foudre jupitérienne : François Hollande l'a limogée, ce mardi 2 juillet en fin de journée, alors qu'elle avait publiquement critiqué le matin même "le mauvais budget" alloué à son secteur.
Delphine Batho, naguère très proche de Ségolène Royal, a quelques raisons de trouver la potion amère. Avant elle, beaucoup d'autres membres de gouvernement ont rué dans les brancards, notamment Arnaud Montebourg, le ministre du redressement productif, sans se faire pour autant limoger.
En outre, ce qu'elle dit est vrai : son budget, qui sera en baisse de 7 % l'an prochain, fait partie des plus mal traités, ce qui est un comble pour un gouvernement qui prétend verdir toute sa politique.
Pour un peu, on la prendrait pour une "Juppette", une ministre femme brusquement débarquée, victime d'un sexisme politique qui ne dirait pas son nom. Ce serait pourtant faux. Delphine Batho paie tout simplement le fait d'avoir mal évalué le rapport de force politique.
Politiquement, elle pèse peu, contrairement à Manuel Valls et à Arnaud Montebourg, qui s'étaient présentés à la primaire socialiste avant de faire allégeance à François Hollande. Elle, elle n'était qu'un second couteau dans l'écurie Royal en nette perte de vitesse. Depuis, d'ailleurs, les liens entre les deux femmes se sont nettement distendus.
Deuxième faiblesse : son travail ministériel à l'environnement était critiqué, et pas seulement par les écologistes. Trop crispée, trop solitaire pour apporter un plus dans l'équipe ministérielle jugeaient nombre de ses collègues, qui l'avaient connue naguère beaucoup plus ouverte.
Un troisième élément a joué : Jean-Marc Ayrault a repris du poil de la bête. Le premier ministre ne veut plus voir son autorité contestée, alors que le gouvernement affronte la récession et que les relations se tendent dangereusement avec les écologistes. François Hollande, qui d'ordinaire fuit l'autoritarisme, lui a donné raison, et de façon spectaculaire, en décidant de se séparer de sa ministre sur "proposition du premier ministre".
C'est un limogeage pour l'exemple qui conforte le premier ministre, mais qui reflète aussi la dureté des temps. Jean-Marc Ayrault a réagi face à l'incartade de Delphine Batho exactement comme Alain Juppé avait réagi, en 1995, face au manque de discipline de son ministre de l'économie, Alain Madelin : il est allé demander sa tête au chef de l'Etat, et l'a obtenue.
Juppé était sorti de l'épisode plus "droit dans ses bottes" que jamais, mais il n'a jamais regretté cet acte d'autorité. Pendant deux ans, il a eu la paix au gouvernement. C'est tout ce qu'il demandait.
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