Mexique : Hommage à Betty Cariňo
Hommage à Betty Cariňo « tisseuse d’espoir »
Bety CARIÑO (MIXTECA – OAXACA – MEXICO) : Ils ont peur de nous parce que nous n’avons pas peur.
« Les pieds droits et fermes sur la terre, la tête dressée bien haut, dignes, l’esprit concentré et le cœur brûlant, frères et sœurs !
Avec ma voix, je parle pour mes frères et sœurs et pour le peuple mexicain, mon peuple, depuis Oaxca la rebelle, dans le grand pays appelé Mexique. Sans parler des autres, parce que je peux seulement exister s’ils existent. Et c’est pourquoi, ainsi, nous existons !
Frères et sœurs, je suis toutes ces femmes à la fois : une fille, une sœur, une mère, une camarade, une enseignante, une femme indignée, une Oaxaqueña, une mexicaine, je les représente.
Nous les femmes qui allons en en avant, conduisant notre peuple contre le pillage de notre Mère la Terre au profit des grandes corporations transnationales et financières du capital. Aujourd’hui, avec nos voix, avec nos combats, avec nos mains, nous conservant vivants les souhaits légitimes pour une justice sociale de la révolution mexicaine ; notre combat est le même que celui des Morelos, Magón et du grand Zapata. Dans le Mexique actuel, le EZLN ( armée Zapatiste de libération nationale) a dirigé une bataille qui a coûté la vie à des milliers de Mexicains, tous de pauvres gens issus de l’échelle sociale la plus basse de la société qui ont participé à ces combats.
Ils sont toujours les exclus de l’histoire et ils ont été oubliés. Aujourd’hui nous, la jeunesse, les peuples indignés et les femmes, nous sommes au sommet de cette catastrophe. Nos champs maintenant sont la scène de ruines et de désastres, victimes de la discrimination des marchés ouverts, des cultures génétiquement modifiées, des ambitions des multinationales. Ce qui a pour conséquence de causer la forte migration de millions de nos frères et sœurs qui selon les mots de ma grand-mère : « ont dû partir de façon à rester (Pour survivre) ».
Au Mexique, le droit à l’autonomie, le droit d’exister pour ces populations indigentes a toujours été dénigré, et aujourd’hui nous voulons vivre une autre histoire : nous nous révoltons et nous disons trop c’est trop ; aujourd’hui et ici, nous voulons dire qu’ils ont peur de nous parce que nous n’avons pas peur d’eux, parce que malgré leurs menaces, malgré leurs diffamations, malgré leur harcèlement, nous continuerons de marcher vers le soleil qui nous le pensons brille fortement ; nous pensons que le jour est proche pour ces populations, le jour qui verra la fin de l’oppression des femmes, le jour pour le peuple du bas.
Actuellement, le mécontentement est présent partout sur toutes les dimensions de notre territoire national. À cause de cela, de notre présence, de notre participation, les femmes que nous défendons ne peuvent endurer plus dans le marché quotidien des droits humains. Nous voulons construire un monde de justice et de dignité, sans aucune sorte de discrimination. Aujourd’hui nous soulevons un processus profond et extensif d’organisation, de mobilisation, d’analyse, de discussion et un consensus qui nous aide à construire un monde dans lequel beaucoup d’autres mondes pourront s’ajuster. Nous sommes le résultat de beaucoup de combats, nous transportons dans notre sang l’héritage de nos grands-mères ; nos racines attendent de nous et de nos filles que nous nous révoltions ! »
(Testimony by Bety Cariño to the Front Line Dublin Platform, February 2010
Traduction Nananews)
La voix de Bety Cariño s’est tue, définitivement, le 27 avril 2010. Elle était à bord d’un convoi humanitaire de militants et d’observateurs internationaux des droits humains qui est tombé dans une embuscade. Elle a perdu la vie aux côtés d’un jeune militant finlandais de 33 ans, Jyri Jaakkola. Il sont été attaqué par un groupe de paramilitaires sur le chemin de la communauté de San Juan Copala (Mexique). Bety Cariño (37 ans), était militante mexicaine en soutien aux groupes de femmes communautaires et aux radios libres. Elle était mariée et mère de deux enfants.
Cela s’est produit cours d’une mission humanitaire pour amener des vivres et des médicaments à la Communauté Autonome de Triqui à San Juan Copala, Oaxaca. Une communauté privée d'électricité, d'eau, de soins médicaux et de provisions de base par un blocus soutenu des paramilitaires. La mission humanitaire était composée d'activistes militant pour la défense des droits de l'homme et de journalistes, mexicains et européens.
Bety Cariño travaillait avec l'équipe de coordination nationale du Réseau mexicain des populations victimes de l'exploitation minière (REMA) et le Centre pour le soutien au rassemblement des communautés (CACTUS). Les meurtres des défenseurs des droits et ressources des indigènes sont monnaie courante dans la région de Triqui. Depuis des générations, les communautés Triqui sont prises dans un cycle de violence, alimenté par l'appropriation de terres et la répression. En conséquence, en 2007, le village de San Juan Copala s'est désolidarisé d'un gouvernement incapable de protéger sa population et s'est autoproclamé communauté autonome. En réponse, la répression exercée par le gouvernement et les paramilitaires s'est encore accrue.
La région triqui est l’une des plus pauvres du Mexique, d’où une migration massive de la population ainsi que des conflits politiques locaux. Les gouvernements successifs n’ont pris aucune mesure pour répondre au dénuement des populations et les organisations locales des droits humains ont accusé le gouvernement en place de 2004 à 2010 d’exploiter les divisions communautaires et de permettre à des groupes armés d’opérer en toute impunité. Cette région souffre d’une absence quasi-totale d’état de droit, étant donné que personne n’a été traduit en justice pour aucun de ces crimes. Du fait de cette impunité, une grande partie de la population est exposée à des attaques et est soumise au contrôle de groupes armés. Le nouveau gouvernement de l’État de Oaxaca, qui a pris ses fonctions en décembre 2010, a promis qu’il s’attaquerait aux problèmes affectant la région Triqui.
« La liberté sans le socialisme c'est le privilège et l'injustice et le socialisme sans la liberté c'est l'esclavage et la brutalité. " Bakounine
Quelques liens :
Témoignage de Bety Carino à la 5ème Plateforme de Dublin (vidéo en espagnol)
Traduction en anglais (format .pdf):
http://www.frontlinedefenders.org/files/en/Testimony%20by%20Bety%20Carino.pdf
Une vidéo en espagnol produite par le Cactus (Centro de Apoyo Comunitario Trabajando Unidos A.C.) et intitulée « BETY CARIÑO, Tejedora de la esperanza »