Interview Arditi
NanaNews.fr a rencontré Pierre Arditi dans le Sud-ouest :
« Entre perle blanche et perle noire »
Comme un premier rendez-vous : Pierre Arditi et Mahia Alonso :
Pas un souffle d'air ce jour-là.
Après avoir sacrifié une heure ou deux à la méridienne imposée par la canicule, l’acteur descend, frais et dispos, sa chemise blanche flattant son teint hâlé et sa chevelure d’argent, dans le salon du « Canard Gourmand » où je l’attends. Un petit hôtel de caractère dont la cuisine est un des fleurons du département. Faisant fi de l’étuve dans laquelle il pénètre en me rejoignant, il s’exclame, un tantinet théâtral – pour le fun – : « Eh bien, me voilà ! »
Une auto dérision accompagnée d’un sourire espiègle dont il sait l’impact charmeur. Et il s’installe sur le canapé, face à moi.
Nous savons tous les deux que notre rencontre doit obéir à un timing serré et en quelques mots je lui présente NanaNews.fr. qui ouvre également et évidemment ses colonnes « aux hommes que nous aimons ». « Je l’espère ! » lance-t-il avant de, en homme élégant, s'avouer flatté de trouver une place dans Nana News.fr.
Tandis qu’il commande, pour lui, un café, pour moi un Vittel glacé, je le lance sur « les femmes de sa vie ». Il ouvre les bras. Vaste sujet ! Puis il se tait, un court instant. J'ai la perception qu'il évalue le sujet et qu'il prend son temps pour s'ouvrir lucide et sincère au dialogue : "Les femmes m’ont toujours mis en face de moi-même. Elles ont une espèce de propension à détester la lâcheté. »
Et voilà ! Quelques secondes de réflexion et il a donné le ton, le "la" en quelque sorte qui allait conduire l'entretien, et j'avoue que au-delà de la jubilation que j'éprouve dans l'instant, je comprends ipso facto pourquoi Pierre Arditi est aimé et estimé de tous, mais surtout des femmes.
Particulièrement ici, à Samaran, petite ville du Gers où nous nous rencontrons. Une place dans le coeur des femmes qu’il su gagner, et les murmures sur son sillage - « il est le même qu’à la télé » - sont révélateurs de leur attachement à la sincérité qu'il dégage. c’est cette authenticité qui les touche. Ce jour-là, elles sont venues nombreuses pour le rencontrer. Elles l'abordent pour un autographe, le sollicitent pour une photo à ses côtés, pépient autour de lui comme des moineaux dans les cerisiers, comme s'il était un grand frère, leur voisin, enfin qu'il faisait partie de leur vie. Et dans le fond, c'est un peu ça, parce que, pas une ne manquerait un épisode de « Sauveur Giordano » ou de « Passeur d’enfant ». Il est l'homme qui sauve, qui prend des risques, qui les fait pleurer et rire, et qu'elles ont la chance de voir enfin. Plus du tout virtuel et bien présent. Elles l'assaillent de questions, se livrent pudiquement tandis que lui, attentif, écoute, les écoute, bienveillant, concerné par les mots qu'il entend. Alors, a être ainsi entendues, elles ont l'impression d'avoir dit des choses essentielles ; enfin jamais dîtes ou jamais osées : on n'approche pas tous les jours un acteur aussi talentueux et de cette envergure dans les petits villages de France. Des minutes de grâce, qui laisseront des étoiles dans les regards bien longtemps après son passage, et vraiment, le salon des antiquaires de Samatan a bien décroché un gros lot lorsque Pierre Arditi a accepté, il y a quatre ans, d'en être le parrain, succédant à Jean-Claude Brialy.
Un amoureux de la vie
Pierre Arditi le dit volontiers : il ne fait que ce qu’il a envie de faire. Sa notoriété sans doute, mais surtout sa pleine maturité lui ont fait don de la liberté :
« J’ai passé l’âge de faire les choses qui m’ennuient ; je mets mon énergie à faire ce qui m’amuse, ce qui m’intéresse. » C’est le plaisir qui conditionne ses choix, dans tous les domaines. Même lorsqu’il quitte à 5 heures du matin le bordelais où il tourne actuellement la saga de Marc Rivière « Le sang de la vigne* », pour rejoindre le salon des antiquaires de Samatan et que la canicule a été annoncée.
C’est donc tout naturellement qu’il a évolué, dans la salon des antiquaires de Samatan, fluide, libre, rayonnant, entre les stands. Qui pourrait après l'avoir approché et observé un tant soit peu, penser qu’il est cabotin ou affecté dans ses contacts avec la foule, ainsi que le sont parfois des acteurs ou des personnalités ?
Au salon, ils sont venu pour lui, il le sait et il respecte cela. Mais lui il est venu aussi pour son public, celui qui le suit depuis des années au travers des films, des pièces de théâtre et des séries télévisées, et il a envie de les rencontrer même si son goût pour les choses raffinées le précède et qu'il explique son intérêt pour les antiquités, la gastronomie et les grands vins... Et il y a tout cela au salon de Samatan, Mecque du foie gras de par le Sud-ouest voire au-delà. On dit Pierre Arditi épicurien et on ne connaît pas d’épicurien sinistre ou compassé !
Omniprésent, et dans Nana News.fr aussi !
Il n’est pas un soir où Pierre Arditi ne soit programmé sur l’une ou l’autre des chaines télévisées, pas une semaine où il n’intervienne sur un sujet d’actualité. Épris comme on le sait, des grands crus, on peut lire ses billets dans le magazine « Terre de vins ». Ce diable d’homme est partout. et même dans NanaNews.fr pour qui aujourd'hui il réfléchit dans l'air trop chaud et étouffant, sérieux et concentré sur le sujet.
"Vivre, c’est renoncer à ces scories qui masquent l’essentiel... "
Il a lancé ça, s'est arrêté une seconde, puis a continué « J’ai eu la chance de croiser dans ma vie des femmes qui ont fait ce que je suis devenu. Ma mère bien sûr, mais c’est le cas de pratiquement tout le monde. J’ai fait plusieurs rencontres de l’adolescence à, on va dire, l’âge mûr, des femmes qui ont croisé ma vie : elles m’ont toujours mis en face de moi-même, ce qui n’est pas rien car les hommes ont cette fâcheuse manie de fuir ce qui les dérange. Elles m’ont appris le courage, oui…»
Il paraît un peu grave, poursuit :
« A mon sens, les femmes ont une espèce de propension à détester la lâcheté. J’ai eu cette chance… »
Les boissons commandées arrivent. La lourdeur moite de l’atmosphère se fait de plus en plus ressentir. Je me dis que sa venue est tout de même un véritable acte d’abnégation. Rien ne justifie sa présence en ce jour de relâche du tournage alors qu’il aurait pu se reposer. Rien sinon son souci de ne pas décevoir ses amis samatanais, son public, ceux qui l'ont porté vers le succès...Une marque de cœur et d'humilité. Incontestablement. Et probablement le plaisir de se savoir tant et simplement aimé .
Il reprend le fil de ses confidences :
« Un certain nombre de choses qui me caractérisent m’ont été apportées par les femmes. Oui, mis en face de moi-même, à la fois perle blanche et perle noire. Elles m’ont appris que j’étais cela et que ce n’était pas grave. Il fallait juste choisir entre les deux. Vivre c’est choisir, c’est renoncer à ces scories qui masquent l’essentiel… »
« Simone Veil s’est battue comme une chienne pour l’avortement ».
Il veut parler des femmes qui l’ont réellement marqué, mais sa vie est dense et touffue, il en a rencontré de si magnifiques, il lui faudrait du temps, et là maintenant le temps nous a échappé avec les minutes et l'heure.
« Pour faire court, je dirai Françoise Giroud, Simone Veil, Indira Gandi… J’ai été tout particulièrement impressionné par cette héroïne de la tragédie du Pakistan… »
Il cherche le nom un bref instant. Il soupire :
« Une très belle femme… Ah ! Benazir Bhutto ! »
Et il reprend :
« Et puis Camille Claudel… »
Il revient alors sur Simone Veil qui est, dit-il, celle qui l’a le plus marqué :
« J’étais présent à l’Assemblée Nationale le jour où elle a présenté la loi sur l’avortement : elle s’est battue comme une chienne, seule contre tous. Autour d’elle, que des hommes mais le seul homme de cet hémicycle, c’était elle ! »
L’entretien s’achève sur ce portrait de femme remarquable, ce modèle de femme volontaire et solide, forte. Il est temps pour lui, de quitter l'aparté que nous avons construit le temps d'un temps volé au temps, justement, et pour honorer ses fonctions de parrainage, de retourner au salon des antiquaires.
La présidente est venue le chercher, mais, avant de nous séparer, c'est avec un beau et franc sourire qu'il a encore souhaité toutes les chances à NanaNews.fr, qui ne peut-être pour lui, qu'un événement majeur et important pour les femmes. Avant de conclure par ces mots : « Et je suis heureux, en tant qu’homme, d’avoir été choisi pour y figurer.
M.A
* « Le sang de la vigne », saga réalisée dans le bordelais par Marc Rivière ; Pierre Arditi y interprète Benjamin Coocker, le célèbre œnologue, imaginé par Jean-Pierre Alaux et Noël Balen. Sortie prévue au printemps prochain sur France 3.
Pierre Arditi est le parrain du salon des antiquaires de Samatan, dans le Gers. Un rôle qu’il a accepté de reprendre après la disparition de Jean-Claude Brialy, parce qu’il aime le Gers : « Le pays est très beau, authentique. Je le connais depuis longtemps, d’abord par mon ami Jean-Luc Moreau qui est du côté de Lectoure et j’ai joué à Auch. Le Gers a cet avantage d’être encore presque vierge ; il n’y a pas de paysages abimés. Les gens sont simples, apparemment un peu rocailleux mais ils sont fidèles, fraternels… Le Gers n’est encore pas trop à la mode. C’est un pays dans lequel on peut disparaître car il est un peu compliqué d’accès. J’aime bien cette culture, ici, à la fois paysanne, rurale et cultivée ce qui n’est pas contradictoire mais complémentaire. Les gersois sont préoccupés par le social dans tous les sens du terme. Avec eux, c’est un rapport approfondi qui tient ; c’est pour cela que je parle de fraternité. Ici justement pas de cette culture « people » et c’est pour cela que ça me plaît… people, je ne sais pas ce que ça veut dire, c’est pas mon problème. Je suis acteur. C’est mon métier. » |