Ma maison de guerre de Seyhmus Dagtekin
MA MAISON DE GUERRE de Seyhmus Dagtekin
Editions Le Castor Astral
ISBN 978-2-85920-864-6« Je suis un drôle qui croit pouvoir se faire un monde, une maison avec des mots qui ne seraient même pas les siens. Parce que certains voudraient que les mots aussi aient leurs appartenances. Et les mots se laissent avoir, se laissent enfermer dans tous les enclos. Ils se mettent dans toutes les bouches, s’épuisent à toutes les besognes comme si un ressort avait dû céder dans la langue.Mais je crois au verbe, à la force instituante de la parole. L’essentiel serait de retrouver le ressort cassé, le lien fondateur entre le mot et nos êtres. Pour arriver, un jour, à ce mot qui nous refonderait, nous pousserait à exister pleinement, où que l’on soit.
Dans la tradition, on dit d’Abraham qu’il était une nation à lui tout seul. Fixer à soi-même et au lecteur cette plénitude comme horizon pour parvenir à une existence pleine et pouvoir accueillir l’autre sans crainte. Mon écriture en général, et ce recueil en particulier, voudraient œuvrer dans le sens d’un tel accomplissement.Seyhmus Dagtekin est né en 1964 à Harun, village kurde au sud-est de la Turquie. Après des études en audiovisuel à Ankara, il arrive à Paris en 1987 où il vit depuis.
Il écrit en turc, en kurde ou directement en français.
ça, c'est une cerise sur la tête de ce vaurien. ça, je ne le dirai pas. Je ne le toucherai pas. Avant, je sortais d'une mine Et la mine était contente Je pouvais me faire très pointu
Et ce que j'écrivais sur une gomme, Je pouvais l'effacer d'une autre pouvais disposer les mots en forme d'escalier pour toucher la neige qui était sur ta tête je n'avais besoin de le dire à personne même pas à l'auteur qui mettait un point d'honneur à ne pas se laisser écrire. Mais je lui trouvais tant de formes que ça lui donnait le tournis. j'oubliais exprès le point du I pour m'y percher et guetter ceux qui passaient aux alentours quitte à ne rien apprendre de ce que tu seras après mais peu importe, je continuerai pour que chaque mot puisse se voir dans le miroir qui est de l'autre côté même si je ne suis jamais sûr que le miroir ne devienne piège et ne nous enferme de chaque côté» (p35-36)