Jeanne-Marie Leprince de Beaumont
Jeanne-Marie Leprince de Beaumont
(1711-1780)
Pédagogue, journaliste et écrivain, auteur de nombreux contes devenus des classiques de la littérature jeunesse.
A la fois innovante, elle introduit l’éducation auprès des jeunes filles, et donc féministe en ce sens, mais également moralisatrice, dans la lignée de ces auteurs féminins qui vont de Mme de Genlis à la comtesse de Ségur, Jeanne-Marie Le Prince allie les connaissances aux principes d’une morale didactique.
Sœur du peintre Leprince, elle perd sa mère très jeune. Elle passe dix ans (1725-1735) à la maison d’éducation d’Ernemont, où elle devient institutrice des petits.
Elle renonce à la vie religieuse et obtient une recommandation pour la cour de Lorraine à Lunéville. Elle sert de dame de compagnie, enseigne la musique, fait la classe aux petits. En 1743, elle épouse Grimard de Beaumont mais l'aventure se terminera très mal car le mari, de mœurs dissolues, dilapide sa dot.
Gouvernante
Au bout de deux ans, elle obtint l’annulation de son mariage en invoquant une « maladie transmissible à sa postérité » chez son mari. Selon le témoignage de Jeanne-Marie elle-même, en septembre 1745 : « Monsieur de Beaumont, mon mari, serait paraît-il mort en duel, du fait d’une de ses victimes au jeu. On l’a trouvé agonisant dans une rue de Saint-Dié. Il n’a pas révélé le nom de celui qui l’avait frappé. Ses poches renfermaient des lettres que l’on m’a apportées et la liste exacte de ses créanciers. L’une d’entre elle m’était adressée. Il y fait amende honorable envers son beau-père et sa belle–mère. (…) Quant à moi, je dois gagner ma vie. Celle de mon enfant reste assurée par le reste de la dotation qui m’avait été faite. Lorsque mes ressources personnelles seront épuisées, je quitterai Nancy. » (Lettre d'Emerance à Lucie, L.de B., in M.-A. Reynaud, Mme Leprince de Beaumont, 1711-1780, p. 137)
En 1748, voulant démontrer la justesse du christianisme, elle publie son premier roman, Le Triomphe de la vérité, qu’elle remet au beau-père de Louis XV, roi de Pologne, Stanislas Leszczynski. Mais le roi ne la récompense pas. Obligée de gagner sa vie, elle confie sa fille Elisabeth à un pensionnat de religieuse et quitte la France pour Londres où elle exerce son métier de gouvernante auprès de jeunes aristocrates anglaises, dont l’éducation était alors fort négligée.
Grâce à quelques relations dans les milieux jacobites, elle devient la gouvernante de la fille de l’ancien premier ministre John Carteret, Lord Grandville. Sophie Carteret, âgée de quatre ans, qui sera « l’enfant de son cœur » est orpheline de mère et a épuisé plusieurs gouvernantes avant Jeanne-Marie qui réussit là où tant d’autres ont échoué, se montrant à la fois ferme lorsque l’enfant fait des caprices mais sachant aussi lui pardonner en lui racontant un conte.
Ecrivain
À Londres, Jeanne-Marie Leprince de Beaumont rencontre Daniel Defoe qui est féministe : il déplore l'absence d'éducation, « seule responsable des différences entre les sexes ». Avec son soutien, elle écrit des œuvres éducatives dont la philosophie annonce déjà Jean Jacques Rousseau. Sa devise étant : " Plaire à la jeunesse en l'instruisant", elle est considérée comme le premier écrivain à avoir volontairement adopté un style simple réellement adapté aux jeunes lecteurs. Avant tout moraliste, elle donne, sous forme dialoguée, un traité complet d’éducation pour jeunes filles dans des ouvrages qu’elle intitule Magasins. Elle publie ainsi les Magasins des enfants, des adolescents et des pauvres, à Londres. Bien qu’elle exprime sa méfiance envers les contes qu’elle considère « pernicieux pour les enfants », le Magasin des enfants comporte des contes destiné à charmer ses lecteurs. C’est dans celui de 1757 que figure un conte, abrégé de la première version écrite par une autre romancière, Gabrielle Suzanne de Villeneuve, qui lui apportera la renommée : La Belle et la Bête. C'est surtout grâce aux contes que Jeanne-Marie Leprince de Beaumont est passée à la postérité.
Après quinze années, elle rentre en France, achète une petite terre près d’Annecy (1763-1769). Là, elle continuera d’écrire, rédigeant nombre d’ouvrages religieux et moraux comptant environ soixante-dix volumes, ce qui, à son époque, constitue un exploit pour une femme-écrivain. Elle se fixe ensuite à Avallon en 1770 et meurt vraisemblablement à Saint-Denis en 1780, près de sa fille et de ses six petits-enfants.
Les contes
Le Magasin des enfants (Londres 1757), abondante collection de contes de fées dont « la Belle et la Bête » est le plus connu, offre un panorama de l’histoire du monde, des leçons de géographie et de sciences naturelles. Le Magasin des Adolescentes (Londres, 1760), qui lui fait suite, mais sans féerie, contient d’autres contes, des récits de la Bible et de l’histoire romaine et des conseils moraux : les années les plus dangereuses commencent à quatorze et quinze ans, il faut donc des mères et des gouvernantes instruites ; la réputation d’une femme ne souffre pas d’ambiguïté. En 1756, Madame Leprince de Beaumont avait écrit un roman épistolaire : « Lettres de Madame du Montiers et de la marquise de *** sa fille », rempli de rebondissements, de réflexions sur le mariage, des intrigues sur la cour de Savoie, où honneurs et disgrâces se succèdent. L’imagination de la romancière s’ajoute ici à beaucoup de pénétration psychologique. Parmi ses dernières œuvres, le Magasin des Pauvres et gens de la campagne (1768), plaidoyer pour le retour à la terre, et Le Magasin des dévotes (1778-1779). La plupart de ses ouvrages ont été traduits et souvent réédités.
La Belle et la Bête
Ce conte apprend aux enfants à distinguer la laideur morale de la laideur physique, à favoriser le rayonnement d’une intelligence, d’un cœur, d’une âme que rend timide un extérieur ingrat. Ce conte est un résumé tiré de la lecture d’un recueil de Mme de Villeneuve, l’amie de Crébillon père, intitulé les « Contes Marins ou la Jeune Américaine ». Les deux sœurs de la Belle ont épousé deux gentilshommes dont l’un symbolise la beauté et l’autre l’intelligence ; ce n’est pas là le vrai fondement d’un amour solide, mais la bonté. Ainsi la Belle ne peut se défendre d’aimer la Bête à cause des attentions inlassables dont celle-ci l’entoure. Le don de soi est justifié par l’estime des bonnes qualités de la personne à laquelle on veut unir sa vie ; ainsi les jeunes filles apprennent l’usage du véritable amour. La Belle, voyant à quelle extrémité elle réduit par ses refus la pauvre Bête, passe sous l’impulsion de la compassion unie à l’estime, de l’amitié à l’amour. Des sentiments purs, estime, délicatesse, élégance morale, reconnaissance en sont les motifs. On trouve ici la justification des mariages fréquents à cette époque, entre hommes murs, souvent veufs, et filles très jeunes. Il ne restait à ces maris âgés qu’à entourer leur jeune épouse de tous les égards, et aux jeunes femmes à respecter la situation mondaine … et la valeur des hommes plus âgés.
L'une des versions les plus anciennes de ce conte est sans doute celle d'Apulée, Amour et Psyché (extrait de l'Âne d'Or), qui date du IIe siècle. En 1150, Francecso Straparola en donna une version qu'il avait tirée du folklore italien et qu'il publia dans ses Nuits Facétieuses (Le Roi Porc, deuxième nuit, 1er conte).
Sources Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jeanne-Marie_Leprince_de_Beaumont
Œuvres
- La Belle et La Bête (1757);
- Le Triomphe de la vérité, ou Mémoires de M. de La Villette, 1748 ;
- Lettre en réponse à l’Année merveilleuse, 1748 ;
- Le Nouveau Magasin françois, ou Bibliothèque instructive et amusante, 1750-51 ;
- Lettres de Mme Du Montier à la marquise de ***, sa fille, avec les réponses, où l’on trouve les leçons les plus épurées et les conseils les plus délicats... pour servir de règle dans l’état du mariage, 1756 ;
- Magasin des adolescentes, ou Dialogues d’une sage gouvernante avec ses élèves de la première distinction, 1760 ;
- Principes de l’histoire sainte, mis par demandes et par réponses, pour l’instruction de la jeunesse, 1761 ;
- Instructions pour les jeunes dames qui entrent dans le monde et se marient, leurs devoirs dans cet état et envers leurs enfans, 1764 ;
- Lettres d’Emerance à Lucie, 1765 ;
- Mémoires de Madame la Baronne de Batteville, ou la Veuve parfaite, 1766 ;
- La Nouvelle Clarice, histoire véritable, 1767 ;, roman épistolaire d’après le roman de Samuel Richardson, Clarisse Harlowe, 1748 ;,
- Magasin des enfants, ou Dialogues d’une sage gouvernante avec ses élèves de la première distinction, dans lesquels on fait penser, parler, agir les jeunes gens suivant le génie, le tempérament et les inclinations d’un chacun... on y donne un abrégé de l’histoire sacrée, de la fable, de la géographie, etc., le tout rempli de réflexions utiles et de contes moraux, 1756-Londres ;
- Magasin des pauvres, artisans, domestiques et gens de campagne, 1768 ;
- Les Américaines, ou la Preuve de la religion chrétienne par les lumières naturelles, 1770 ;
- Éducation complète, ou Abrégé de l’histoire universelle, mêlé de géographie et de chronologie, 1772 ;
- Contes moraux, 1774 ;
- La Dévotion éclairée, ou magasin des dévotes, 1779.