Sanofi veut céder ses « vieux » médicaments
Le Monde | 09.09.2014 à 16h25 • Mis à jour le 09.09.2014 à 17h26 | Par Chloé Hecketsweiler
Le façonnier – comme on appelle les sous-traitants dans le secteur pharmaceutique – prévoit le maintien des 350 emplois sur le site et des investissements pour renforcer les capacités de production.
De son côté, Sanofi s'est engagé à remplir le carnet de commandes de l'usine pour une durée minimale de sept ans.
Quetigny produit entre autres du Stilnox (somnifère), du Plavix (antithrombotique) et la célèbre pommade pour bébé Mytosil, des médicaments phares du groupe, mais dont le brevet est tombé dans le domaine public.
« Ce projet permettrait d'apporter des volumes nouveaux à Quetigny, de consoliderses atouts et d'assurer sa pérennité », indique Alain Peychaud, vice-président des affaires industrielles chez Sanofi.
100 MILLIONS DE BOÎTES DE MÉDICAMENTS PAR AN
Le site, créé en 1968, fabrique aujourd'hui 100 millions de boîtes de médicaments par an, dont 64 % sont exportées. Sa cession devrait être bouclée à la fin du premier trimestre 2015.
L'annonce a surpris les salariés, malgré les rumeurs qui couraient depuis plusieurs mois. « Nous ne pensions pas que cela irait si vite car notre productivité est excellente et l'activité soutenue », souligne Loïc Berland, délégué syndical CGT de l'usine.
« Quetigny travaille déjà en sous-traitance pour d'autres laboratoires et Sanofi aurait très bien pu chercher de nouveaux clients », ajoute-t-il.
Les élus locaux sont également tombés des nues. « Le directeur de l'usine m'a annoncé la nouvelle quelques heures seulement avant l'annonce officielle aux salariés », indique Michel Bachelard, maire de Quetigny.
« En juin, j'avais posé très clairement la question de l'avenir du site aux dirigeants de Sanofi, et on m'avait habilement répondu que je n'avais pas d'inquiétude à avoir », précise l'élu, qui se félicite malgré tout que l'acquéreur soit un industriel français plutôt qu'un « fonds de pension exotique ».
INQUIÉTUDES POUR TROIS AUTRES SITES
Les usines de Compiègne (Oise) et Amilly (Loiret), ainsi que le centre de distribution de Marly-la-Ville (Val-d'Oise) pourraient bien être les prochains sur la liste des cessions.
Ces trois sites sont mentionnés dans un document interne de 25 pages – baptisé « Projet Phoenix » – qui vise à « réduire l'empreinte industrielle du groupe en Europe ».
Daté du 6 mai et présenté au comité d'investissement de Sanofi, il évoque aussi la vente de deux cents médicaments anciens. Un package à plus de 6 milliards d'euros.
« Cette étude n'est qu'un scénario parmi d'autres, et Quetigny est le seul projet de cession en cours », assure une porte-parole du groupe, qui rappelle que Sanofi a investi dans ses usines françaises 1,6 milliard d'euros ces cinq dernières années.
Sanofi sait que le sujet est sensible : le groupe compte 27 500 salariés en France, dont 12 000 dans ses usines, et la moindre de ses décisions est scrutée à la loupe par les politiques.
En 2012, Christopher Viehbacher avait ainsi été « invité » par Arnaud de Montebourg, alors ministre du redressement productif, à s'expliquer sur son plan de réorganisation des sites de recherche. Après un entretien houleux, il en était ressorti en pestant : « Je ne veux plus jamais voir ce monsieur. »
MARGE ÉLEVÉE
La cession des médicaments tombés dans le domaine public et copiés n'est cependant pas nouvelle. « Cela fait dix ans que j'en entends parler, plaisante Philippe Lanone, analyste chez Natixis. Mais la décision de les céder n'est pas simple, car ces médicaments contribuent beaucoup aux résultats du groupe. Ils ne coûtent pas grand-chose – puisque la recherche est déjà amortie – et leur marge reste élevée. »
Autre élément dans la balance : ces « vieux » médicaments sont les plus vendus dans les pays émergents, précisément là où Sanofi cherche à se développer.
Enfin, il ne sera pas facile de trouver un acheteur, estime M. Lanone. « Des financiers pourraient s'y intéresser, mais le plus probable est la création d'une joint-venture avec un autre laboratoire qui cherche lui aussi à se séparer d'une partie de son portefeuille. »
Parmi les candidats potentiels figurent le britannique GSK, dont le portefeuille vaut environ 8,5 milliards d'euros, ainsi que les américains Merck (11,6 milliards) et Abbott (environ 4 milliards).
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